L’agilité à échelle, également appelée « Agile@Scale », est un cadre, une organisation, qui permet de faire travailler ensemble plusieurs équipes agiles « multi compétences » autour d’un même produit ou service. La mise en place de ce modèle de travail transverse induit donc nécessairement de toucher à l’organisation de l’entreprise et de bousculer les modèles traditionnels de type pyramidal ou en silo.
Jusque-là le plus souvent cantonnée au périmètre de la DSI, l’agilité tend à se développer et à déployer ses principes et ses valeurs à l’ensemble de l’entreprise.
Plus qu’une méthodologie de gestion de projet, l’agilité est avant tout un état d’esprit qui s’instaure progressivement pour glisser vers une organisation apprenante, en perpétuelle amélioration, afin de gagner en performance et offrir plus de valeur aux clients. Cette transformation en profondeur passe par une évolution du rôle des managers qui deviennent des leaders au service de leur équipe.
Sommaire :
Une organisation agile au service de l’efficacité
La mise en place d’organisations agiles à l’échelle permet de répondre efficacement aux enjeux de performance et d’adaptation au marché des entreprises en accélérant les gains de productivité, en encourageant l’innovation, et en attirant et fidélisant les talents.
L’organisation agile favorise en effet la prise en compte des besoins utilisateurs de façon plus efficace, un livrable de meilleure qualité, et une meilleure synchronisation des équipes. Elle permet de :
⏱️ réduire le « time to market » en permettant aux équipes d’être plus réactives et plus libres d’innover pour s’adapter aux évolutions du marché ;
👍🏻 apporter plus de valeur aux clients en mettant ce client au cœur du projet et en échangeant avec lui régulièrement pour être parfaitement en phase avec ses attentes ;
⚙️ optimiser les processus en favorisant les circuits courts qui facilitent les changements de priorité en cours de projet et aident à maîtriser les coûts, les investissements et les risques ;
💡 donner du sens au travail des collaborateurs en développant l’autonomie, la responsabilisation, la dynamique de groupe, la répartition claire des rôles et la fluidité des interactions.
Un modèle agile orienté « produit »… donc client
Dans une organisation agile, les équipes sont généralement de taille réduite et multi compétences. Chaque équipe est responsable de son produit, de la conception à la mise sur le marché, et de son amélioration permanente en étant en contact régulier avec les utilisateurs et en phase avec le marché.
Grâce à cette organisation en mode agile :
- l’équipe est focalisée sur son produit/offre/service et ses utilisateurs tout en tenant compte des objectifs de l’entreprise et des contraintes internes, notamment celles des autres équipes ;
- le projet ne s’arrête pas à la livraison car le client/utilisateur reste au centre des préoccupations avec des jalons réguliers de résultats et d’amélioration continue ;
- le pilotage est basé sur l’efficacité opérationnelle, la création de valeur et la satisfaction des utilisateurs.
Il existe plusieurs « frameworks » (cadres de travail) d’agilité, tels que SAFe, LeSS, Scrum of Scrum (SoS), etc.
Parmi eux, le modèle Spotify – le plus répandu – est organisé autour de “Squads”. Une Squad est une équipe autonome et pluridisciplinaire de 5 à 10 personnes, libres de choisir les méthodes agiles à utiliser (Scrum, Kanban, Lean startup, etc.) pour mener à bien un projet spécifique sur un périmètre précis.
Les Squads travaillant sur un même enjeu fonctionnel ou technique sont réunies dans une “Tribu” focalisée sur une partie du projet global, et généralement accompagnée par un facilitateur coach agile.
Dans chaque Tribu, une ou plusieurs équipes transverses appelées « Chapitres » et constituées d’un membre de chaque Squad, assurent le partage de l’information pour une meilleure vision globale du projet.
Enfin, indépendamment des Tribus, les personnes ayant des compétences ou un intérêt commun peuvent se regrouper dans une « Guilde » pour favoriser la veille sur un sujet… donc la réussite du projet.
Quel que soit le « framework » choisi, l’agilité est avant tout un état d’esprit qui implique de s’améliorer en continu en créant ses propres pratiques et en les adaptant au contexte.
Nouvel état d’esprit, nouvelle culture d’entreprise
Pas d’agilité à l’échelle de l’entreprise sans une évolution de l’état d’esprit et de la culture interne. L’agilité, c’est 30 % de pratiques/outils… et 70 % de culture ! L’enjeu majeur est donc de développer le « mindset » nécessaire pour favoriser le travail collectif, « désiloter » et lever les freins culturels.
L’agilité à l’échelle de l’entreprise transforme la façon de travailler et la culture d’entreprise. Elle crée un état d’esprit propice à la transformation de l’entreprise ou de l’organisation. Centrée sur l’humain, elle favorise la créativité, l’autonomie, l’innovation et le « bonheur au travail ».
Pour infuser cette nouvelle façon de travailler et briser les réticences au changement, il est nécessaire de faire de la pédagogie auprès des équipes et leur expliquer le sens, la raison et leur rôle dans la transformation. Plus le collaborateur est impliqué dans la transformation agile de son entreprise, plus il est amené à prendre des initiatives et à s’investir.
Au fur et à mesure, l’état d’esprit se transforme et se construit. La démarche commence souvent par une équipe pilote, puis d’autres équipes suivent, se lancent et pratiquent.
« Petit à petit, l’agilité s’incarne dans chaque action et devient un moyen de fonctionner qui se nourrit des gains de créativité et de performance dans une boucle vertueuse. Cela concourt à transformer en profondeur l’état d’esprit et assure la pérennité de l’agilité à l’échelle. »
Extrait du rapport « Agile at scale : mise en œuvre de l’agilité à l’échelle de l’entreprise » de l’association Cigref (décembre 2018)
Comme les collaborateurs bénéficient de plus d’autonomie avec la transformation agile, le rôle du manager évolue également vers un rôle de leader au service de son équipe.
Manager leader, un nouveau modèle managérial
La mise en place de l’agilité à l’échelle entraîne nécessairement une profonde transformation et l’adoption de nouveaux modèles managériaux basés sur l’autonomie et la responsabilisation des équipes, une nouvelle répartition des rôles et une diminution des strates managériales. Ainsi, dans ce modèle, les fonctions de directeur de département, de service tendent à disparaître au profit de nouvelles fonctions : leaders de tribus, leaders de chapitres, directeurs de programmes…
L’agilité modifie le rôle du manager qui transmet le sens, la vision (quoi-pourquoi) et délègue la réalisation (comment) à l’équipe, se rendant pleinement disponible pour ses collaborateurs. Les managers deviennent ainsi des leaders au service de leur équipe (« servant leaders« ). Imaginez le changement de posture !
En tant que leader, le manager agile encourage la confiance mutuelle, développe les capacités de création et d’innovation de ses collaborateurs et favorise l’intelligence collective. La transparence, la confiance et la fluidité de l’information permettent à l’équipe d’innover en toute autonomie, de prendre des risques et de mener à bien son projet dont elle assume la responsabilité dans la durée.
Ainsi, ce n’est plus uniquement le manager qui motive ses équipes, mais c’est l’environnement de travail suscité par le management qui crée la motivation et la performance.
Le manager leader délègue progressivement son pouvoir de décision à l’équipe et l’accompagne pour faire monter en compétences chacun de ses membres.
Un nécessaire accompagnement des équipes
Mener une transformation agile à l’échelle de son organisation ne se fait pas du jour au lendemain. Cela nécessite une transition progressive pour accompagner les collaborateurs et le management.
L’agilité s’instaure tout d’abord par une acculturation, une prise de conscience des bienfaits de l’organisation en mode agile pour le bien-être des collaborateurs, le bénéfice des clients et la performance de l’entreprise. Cela passe par un accompagnement et une formation des équipes en amont de leur passage à l’agilité.
L’agilité à l’échelle s’instaure surtout par la pratique, en commençant par de petits projets en mode pilote qui permettront aux équipes de générer rapidement des succès encourageants et de capitaliser sur ces premières réussites pour commencer à faire évoluer la culture d’entreprise.
Ces premiers succès vont permettre de former des ambassadeurs et de polliniser l’agilité à l’échelle dans la durée au sein de l’organisation.
Enfin, pour faciliter la mise en place de l’agilité à l’échelle, l’accompagnement du middle management, fortement impacté par l’évolution du modèle managérial, est incontournable.
En somme, le passage à l’échelle permet aux équipes de favoriser la collaboration, de développer et de valoriser leurs compétences et leur expertise. C’est un enjeu de taille pour attirer et fidéliser les talents, en particulier les plus jeunes générations.
L’agilité est donc un formidable moyen, à l’échelle d’un service ou d’une entreprise, pour prioriser, s’adapter et s’ajuster en permanence sur les besoins du client final. Toutefois, si ce modèle s’adapte parfaitement aux services d’IT, aux entreprises de la Tech, aux startups, etc. la première question à se poser est celle de l’opportunité et de l’intérêt pour son entreprise.
Avant de se lancer dans une transformation agile à l’échelle de l’entreprise, il est donc préférable d’identifier le réel besoin de changement, le véritable intérêt pour l’organisation, car devenir agile n’est pas une fin en soi, mais un moyen d’atteindre ses objectifs. D’où l’importance d’être conseillé et accompagné dans cette démarche !