Useo est une PME familiale française spécialisée historiquement dans l’injection de matières plastiques à usage unique pour l’aérien, le food service et l’agroalimentaire.
Face aux évolutions réglementaires et aux attentes sociétales, l’entreprise a mené une transformation industrielle, humaine et stratégique majeure pour adapter sa production et baser sa fabrication essentiellement sur la cellulose moulée.
Dans cet entretien, Arnaud Revel, directeur général en charge des opérations chez Useo, décrit les choix, les étapes et l’appropriation de la méthode OKR comme levier d’exécution stratégique. Le mot d’ordre : transformer une vision en résultats concrets, maîtriser l’exécution stratégique et faire vivre ce changement au quotidien.
Sommaire
- Présentation d’Useo et périmètre d’activité
- La transformation : industrielle, humaine et organisationnelle
- Choisir la méthode OKR pour piloter l’exécution stratégique
- Adoption des OKR : impulsion nécessaire de la Direction
- Déploiement des OKR : gouvernance, accompagnement et adoption
- Accueil de la méthode OKR en interne
- Les bénéfices et succès concrets observés
- Les résistances, difficultés et ajustements
- Perspectives : industrialisation, culture et autonomie managériale
- + Exécution stratégique : enseignements clés et bonnes pratiques à retenir
- + FAQ pratique pour les dirigeants qui veulent déployer les OKR
Pouvez‑vous expliquer en quelques phrases l’activité d’Useo ?
A.R. Useo conçoit et fabrique des objets pour l’art de la table à destination de trois grands secteurs : le monde aérien (service à bord), le food service (restauration hors foyer, grandes marques du fast‑food) et l’agroalimentaire (packaging pour la vente en supermarché).
Notre métier est à la fois technique et industriel : nous concevons des couverts, des verres, des couvercles, des barquettes et une large gamme de produits destinés à l’expérience de consommation.
Historiquement, Useo était un grand fabricant de produits en plastique à usage unique. Ces dernières années, nous avons opéré une transformation profonde pour réduire l’impact environnemental de nos produits et répondre aux nouvelles attentes réglementaires et clients.
Nous avons fait le choix de développer des produits en cellulose moulée parce que notre ambition était multiple : remplacer le plastique par une ressource locale, renouvelable, recyclable, et qui minimise l’impact dans la nature. Le papier et la cellulose répondent à ces critères.
La transformation de votre entreprise a-t-elle été uniquement industrielle ?
A.R. Non : la transformation a été totale !
Nous avons investi pour construire une nouvelle usine dédiée de 10 000 m² et remplacé l’essentiel de nos machines. Mais la transformation a concerné tous les étages de l’entreprise : les compétences, la supply chain, le bureau d’études, le modèle commercial, les modes de pilotage et les indicateurs financiers.
Concrètement, nous avons changé 90 % de notre assortiment en moins de 18 mois.
Pour une structure de 80 personnes spécialisée depuis des décennies dans le plastique, cela signifie recruter des ingénieurs papetiers, créer une école interne de formation pour faire monter nos équipes historiques sur le nouveau process, revoir les calculs de coûts et les ratios de pilotage, et réinventer le business model pour intégrer une logique d’usage unique vertueuse et un pôle réemploi.
Pourquoi avoir choisi les OKR pour accompagner la mise en œuvre de cette transformation et de l’exécution stratégique ?
A.R. Après la mise en route de l’usine, nous faisions face à une « impermanence » systémique : crise sanitaire, crise en Ukraine, crise énergétique…
Il est devenu clair que les crises n’étaient plus des événements exceptionnels mais notre quotidien. Nous avons donc cherché une méthode flexible, capable d’aligner l’organisation tout en gardant la capacité d’adaptation.
Les OKR (Objectives & Key Results) sont apparus comme une réponse pertinente pour être plus structuré et plus efficace : ils permettent de nous remettre en cause, de nous adapter au quotidien.
Qui a porté l’initiative autour de la méthode OKR chez Useo ?
A.R. L’impulsion est venue du directeur général, Antoine Quinson, qui a posé le cadre stratégique : accepter l’impermanence et s’organiser pour performer dans ce contexte. Il m’a demandé de trouver une méthode pour travailler dans cet environnement. J’ai proposé les OKR et Antoine a immédiatement adhéré à cette démarche.
Nous avons décidé ensemble de nous approprier la méthode OKR avec la conviction qu’elle pouvait s’adapter à une PME industrielle comme la nôtre.
Nous avons sollicité l’accompagnement de TalenCo pour nous aider à structurer et à déployer la démarche en restant fidèles à nos valeurs et à nos contraintes opérationnelles.
Comment s’est déroulé le déploiement des OKR en interne ?
A.R. Avec le comité de direction et tous les responsables de services, nous avons décidé d’associer absolument tout le monde et tous les services dans la démarche OKR.
Deux règles simples ont guidé le déploiement : d’abord, considérer cette phase comme un test – nous avions le droit d’arrêter si cela ne convenait pas ; ensuite, viser une adhésion majoritaire (80 % d’adhésion visée) sans exiger l’unanimité.
L’accompagnement externe (TalenCo) a permis d’expliquer la méthode et de rassurer en montrant que la démarche est modulable. Nous avons posé des règles de jeu claires et construit nos OKR en itérations trimestrielles.
Quelles ont été les premières réactions au sein des équipes ?
A.R. L’accueil des OKR a été plutôt positif. Un point clé a été d’expliquer que l’on pouvait fixer des objectifs ambitieux sans les atteindre à 100 % et que l’atteinte partielle (par exemple 70 %) n’est pas synonyme d’échec complet, mais de terrain d’apprentissage.
Dans notre culture industrielle, viser 100 % est la norme ! Accepter 70 % a été un vrai « switch » mental. Cette approche a apporté de la respiration et a permis aux équipes d’oser fixer des objectifs ambitieux sans la peur paralysante de la sanction.
Le mécanisme du « phare dans la nuit » — revenir régulièrement sur les priorités pour recentrer les actions — a été perçu comme utile : il permet de remettre l’église au milieu du village quand chacun tend à emprunter son propre chemin.
Quels bénéfices concrets avez-vous observés après plusieurs cycles OKR ?
Les OKR ont d’abord joué le rôle de « phare dans la nuit » : lors des points trimestriels, nous recentrons tout le monde sur les priorités et reprécisons la trajectoire.
La logique du pas à pas facilite la coordination transverse et le pilotage de l’exécution stratégique.
Les équipes apprécient la clarté des priorités et la transparence des indicateurs. À court terme, cela a amélioré la communication entre services et donné une structure aux efforts de transformation.
Avez-vous rencontré des limites ou des difficultés avec la méthode OKR ?
Notre plus grand défi reste l’appropriation par le management. L’animation des OKR doit devenir l’outil naturel des managers pour piloter leurs équipes au quotidien, mais aujourd’hui, la tenue repose encore fortement sur la direction générale.
Il faut donc rendre la méthode OKR plus simple, plus routinière, pour que les managers l’intègrent dans leurs rituels. Parfois, on s’était imposé trop de contraintes ; nous travaillons à alléger et adapter les formats pour permettre l’autonomie.
En somme, la contrainte n’est pas méthodologique mais humaine — le fameux « facteur humain ». Changer des habitudes construites sur vingt ou trente ans prend du temps.
Quel est votre objectif pour l’avenir de la démarche OKR chez Useo ?
Notre ambition est que les OKR deviennent un réflexe : un outil d’autonomie pour chaque manager et collaborateur.
Pour cela, nous devons simplifier les routines, clarifier les formats et intégrer la méthode à notre culture d’entreprise et aux rituels d’équipe.
Les nouvelles recrues doivent intégrer cette culture dès leur arrivée; il y a actuellement des mouvements humains qui vont nous aider car les entrants intègrent l’outil dès leur arrivée. L’objectif final est d’atteindre une autonomie généralisée où chacun est autonome.
Au final, recommanderiez-vous la méthode OKR à d’autres entreprises ?
Oui, définitivement. Les OKR sont une méthode adaptée pour toutes les entreprises, les grands groupes comme Renault comme les PME.
Mon conseil est double :
- d’une part, il faut un engagement fort de la direction générale — sans conviction de la Direction et du management, la méthode ne prend pas ;
- d’autre part, il est précieux d’être accompagné. L’accompagnement OKR permet d’adapter la méthode au contexte, d’éviter les écueils et d’accélérer l’apprentissage.
Enfin, il faut accepter que c’est du travail supplémentaire au début, mais c’est structurant et les gains en exécution stratégique se voient assez vite.
« Il faut accepter l’impermanence et s’organiser pour la maîtriser : c’est là que les OKR prennent tout leur sens. »

La trajectoire d’Useo illustre qu’une transformation industrielle ambitieuse exige autant un choix technologique pertinent qu’une capacité à réinventer l’exécution stratégique.
Les OKR se sont révélés un cadre opérant pour matérialiser la vision en actions mesurables, aider à prioriser et engager les équipes. Mais la clé réside dans la combinaison : portage fort de la direction, accompagnement externe adapté, formation et simplification des routines pour que la méthode devienne réflexe.
En résumé, pour conduire une transformation aussi importante que celle d’Useo, il faut aligner la stratégie, les compétences, l’organisation et les rituels d’exécution stratégique — et les OKR sont un levier puissant pour y parvenir !
Exécution de la stratégie : 5 enseignements clés et bonnes pratiques chez Useo
- “Accepter l’impermanence” : structurer l’organisation pour vivre dans un environnement instable.
- Choisir une méthode adaptable : les OKR permettent de rester flexibles tout en donnant de la rigueur à l’exécution stratégique.
- Associer toutes les fonctions : impliquer l’ensemble des services dès le départ pour éviter les silos.
- Se faire accompagner : un facilitateur externe aide à s’approprier la méthode OKR et à respecter le cadre, tout en adaptant la méthode aux spécificités de l’entreprise.
- Simplifier pour gagner en autonomie : alléger les formats pour que les managers s’approprient les rituels et facilitent l’exécution stratégique.
Le déploiement de la méthode OKR chez Useo en 5 questions
Pourquoi avoir choisi les OKR pour piloter la transformation ?
Face à une succession de crises et à une « impermanence » durable, Useo cherchait une méthode suffisamment adaptable pour garder sa flexibilité et assez structurante pour améliorer l’efficacité opérationnelle. La méthode OKR a été choisie parce qu’elle facilite l’alignement, la priorisation et l’exécution stratégique sur des cycles courts.
Comment Useo a‑t‑il déployé la méthode OKR en interne ?
La direction générale a porté l’initiative, puis la démarche a impliqué tous les services. Le déploiement s’est fait avec des principes simples : tester sans obligation, viser une majorité d’adhésion et être accompagné par des experts (TalenCo) pour adapter la méthode au contexte de l’entreprise.
Quels ont été les principaux obstacles rencontrés ?
Le principal défi est l’appropriation par les managers : transformer la méthode en outil quotidien d’animation est encore en cours. Il faut simplifier les formats et intégrer les rituels pour que les managers gagnent en autonomie. Le facteur humain reste le plus long à faire évoluer.
Quel est le rôle du top management dans la réussite des OKR ?
Indispensable ! La direction générale doit afficher une conviction forte et rester engagée. Sans leadership visible et maintien du cadre, la méthode peine à s’installer. L’accompagnement externe est utile, mais le sponsor interne est primordial.
La méthode OKR convient-elle à une PME industrielle ?
Oui. Useo est la démonstration qu’une PME industrielle peut tirer profit des OKR : la méthode est adaptable à la taille et au secteur, à condition d’avoir une volonté de transformation et un accompagnement pour contextualiser la démarche.
Propos recueillis par Cyrille Chaudoit, Cofondateur de TalenCo. Un grand merci à Arnaud pour son témoignage !
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